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Le Coq et le Renard
7 janvier 2004
par Jean de la Fontaine
Sur la branche d’un arbre était en sentinelleUn vieux coq adroit et matois.« Frère, dit un renard, adoucissant sa voix,Nous ne sommes plus en querelle :Paix générale cette fois.Je viens te l’annoncer, descends, que je t’embrasse.Ne me retarde point, de grâce :Je dois faire aujourd’hui vingt postes sans manquer.Les tiens et toi pouvez vaquerSans nulle crainte à vos affaires ;Nous vous y servirons en frères.Faites-en les feux dès ce soir,Et cependant, viens recevoirLe baiser d’amour fraternelle.- Ami, reprit le coq, je ne pouvais jamaisApprendre une plus douce et meilleure nouvelleQue celleDe cette paix ;Et ce m’est une double joieDe la tenir de toi. Je vois deux lévriers,Qui, je m’assure, sont courriersQue pour ce sujet on envoie.Ils vont vite et seront dans un moment à nousJe descends : nous pourrons nous entre-baiser tous.- Adieu, dit le renard, ma traite est longue à faire,Nous nous réjouirons du succès de l’affaireUne autre fois. » Le galand aussitôtTire ses grègues, gagne au haut,Mal content de son stratagème.Et notre vieux coq en soi-mêmeSe mit à rire de sa peur ;Car c’est double plaisir de tromper le trompeur.
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