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Le Loup et le Chien maigre
21 février 2004
par Jean de la Fontaine
Autrefois carpillon fretinEut beau prêcher, il eut beau dire,On le mit dans la poêle à frire.Je fis voir que lâcher ce qu’on a dans la main,Sans espoir de grosse aventure,Est imprudence toute pure.Le pêcheur eut raison ; Carpillon n’eut pas tort :Chacun dit ce qu’il peut pour défendre sa vie.Maintenant, il faut que j’appuieCe que j’avançai lors, de quelque trait encor.Certain loup, aussi sot que le pêcheur fut sage,Trouvant un chien hors du village,S’en allait l’emporter. Le chien représentaSa maigreur : « Jà ne plaise à Votre SeigneurieDe me prendre en cet état là ;Attendez : mon maître marieSa fille unique, et vous jugezQu’étant de noce, il faut, malgré moi, que j’engraisse.Le loup le croit, le loup le laisse.Le loup, quelques jours écoulés,Revient voir si son chien n’était point meilleur à prendre ;Mais le drôle était au logis.Il dit au loup par un treillis :« Ami, je vais sortir ; et si tu veux attendre,Le portier du logis et moiNous serons tout à l’heure à toi. »Ce portier du logis était un chien énorme,Expédiant les loups en forme.Celui-ci s’en douta. « Serviteur au portier, »Dit-il ; et de courir. il était fort agile ;Mais il n’était pas fort habile :Ce loup ne savait pas encor bien son métier.
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